La journée de formation pour les 40 professionnels de la petite enfance des MAPE s’est tenue le 23 octobre 2019. Déjà intervenue dans d’autres établissements de l’AVVEJ, Corine Zongo-Wable avait été sollicitée par l’équipe de direction pour sa connaissance d’une thématique essentielle dans un établissement qui accueille une forte proportion de familles d’origine subsaharienne.

 
Corine Zongo-Wable a un Doctorat en Anthropologie Sociale, elle séjourne régulièrement en Afrique et mène parallèlement à une carrière de chercheuse et de formatrice, une expérience de réalisatrice et de monteuse de films documentaires.  
Après un DU en psychiatrie et compétences transculturelles auprès de Marie Rose Moro, ses recherches en anthropologie se sont orientées autour de la construction identitaire des jeunes femmes noires en France et des grossesses en situation de migration dans un centre d’accueil d’urgence à Paris et au Burkina Faso. Elle est responsable de la recherche au CRESSAS : Centre de Recherche et d’Études sur les Savoirs Africains en Sciences Sociales situé au Burkina Faso.

Aux MAPE et sans doute dans tous les foyers maternels et parentaux, les différents types de migration et l’exil qu’ont connu les familles accueillies créent des situations complexes de prise en charge et de compréhension des problématiques liées à ces origines culturelles et aux parcours de migration.

Il est pourtant essentiel que le projet d’établissement qui revendique « dans le texte » la prise en compte de ces dimensions interculturelles en montre une traduction dans l’acte éducatif quotidien, alors que l’histoire de ces familles mobilise des connaissances que les professionnels n’ont pas eu souvent l’occasion d’aborder pendant leur formation.

Les stéréotypes de ces parentalités venues d’ailleurs rencontrent et parfois heurtent ceux qui sont dominants dans la culture occidentale, avec des conséquences déterminantes sur le regard institutionnel porté sur ces familles. Alors que l’observation dans les établissements participant de la protection de l’enfance est un travail de précision chirurgicale, l’interprétation ne peut être pertinente et seulement légitimée par les connaissances et les compétences partagées. Les gestes quotidiens (soins, portage, alimentation, etc.) mais aussi l’exercice de l’autorité, les représentations maternelles et paternelles, l’effet de la migration, tous ces éléments doivent être envisagés de points de vue décalés. Et il nous faut estimer, parfois réévaluer les compétences parentales reconnues aux familles pour s’en servir dans l’accompagnement éducatif.

Les objectifs de la formation étaient ainsi formulés :

  • Dépasser les différences culturelles en pratiquant le décentrage, analyser les stéréotypes
  • Appréhender la relation mère-enfant dès la grossesse et l’implication des pères
  • Acquérir des connaissances autour de la place de l’enfant, le rôle et le statut des parents, les méthodes éducatives
  • Reconnaître la place des croyances et de la religion
  • Identifier ce qui relève du culturel et du pathologique
  • Comprendre et analyser les situations potentiellement génératrices de conflit
  • Mettre en place de nouveaux mécanismes relationnels avec de nouveaux outils

Corine Zongo-Wable a su transmettre et susciter les échanges avec un public composé de professionnels réunis par une même mission mais dont les formations sont diverses : éducatrices de jeunes enfants, agents d’accompagnement petite enfance, auxiliaire de puériculture, psychologues, assistantes maternelles, infirmières et cheffes de service.

Les participantes ont apprécié très positivement cette formation qui a interrogé leurs pratiques, remis en cause quelques certitudes, ouvert des pistes de réflexion qui seront suivies dans le quotidien du travail institutionnel.
Plutôt bon signe : elles ont trouvé la formation trop courte et souhaité des prolongements. Elles ont aussi regretté que les autres professionnels qui interviennent auprès des parents et des enfants, éducateurs spécialisés pour l’essentiel, n’aient pas été concernés par cette journée. On ne peut leur donner tort sur la nécessité de complémentarité des interventions et de cohérence du plateau technique, mais il n’est pas inutile de reconnaître quelques spécificités aux professions de la petite enfance avec le bénéfice de l’exclusivité d’un jour.
Mais de toute évidence, une suite s’impose.